Le procureur équatorien en charge de l’enquête sur la prise d’otages sur le plateau de la chaîne TC a été assassiné à Guayaquil, retrouvé dans sa voiture.
Malgré le fait qu’il se déplaçait dans un véhicule blindé, le procureur équatorien chargé de l’enquête sur la prise d’otages en direct sur le plateau d’une chaîne de télévision a été assassiné à Guayaquil le mercredi 17 janvier. Sa mission consistait à déterminer quel gang avait perpétré cette attaque lors de l’incident du 9 janvier, qui avait suscité un choc au sein du pays et à l’échelle internationale en raison de la violence des images diffusées, comme cela avait été rapporté dans notre vidéo en tête d’article au moment des faits.
Les médias locaux ainsi que l’Agence France Presse ont partagé des images de la voiture du procureur, présentant plusieurs impacts de balles sur la vitre de la portière gauche. Cet événement s’inscrit dans le contexte de la “guerre” en cours entre les gangs de trafiquants et l’État.
“En réponse au meurtre de notre collègue César Suarez (…), je serai catégorique : les groupes du crime organisé, les criminels et les terroristes n’arrêteront pas notre engagement envers la société équatorienne,” a déclaré la procureure générale Diana Salazar dans une vidéo postée sur X. De son côté, le ministre de la Défense Gian Carlo Loffredo a déclaré dans un communiqué que son gouvernement rejetait “toute forme de violence comme réponse au conflit que nous connaissons”.
Le lendemain de cet assassinat, la police équatorienne a annoncé l’arrestation de deux suspects, après une procédure d’enquête ayant “permis d’identifier leur participation présumée à l’acte criminel”, a déclaré César Zapata, chef de la police générale sur X.
Des tirs en direct à la télévision
Le 9 janvier, un groupe d’hommes fortement armés et cagoulés avait fait irruption dans les locaux de la chaîne TC à Guayaquil, forçant journalistes et employés à se jeter au sol sous la menace. “Ils sont entrés pour nous tuer, mon Dieu protégez-nous”, avait déclaré l’un des journalistes pris en otage dans un message WhatsApp.
Au milieu des échanges de tirs, la diffusion de ces images surréalistes s’est poursuivie en direct pendant de longues minutes, malgré l’extinction des lumières sur le plateau et le figement de la caméra. Quelques images restent gravées dans la mémoire collective : les gestes faits devant la caméra par les assaillants, fanfaronnant pour revendiquer leurs gangs respectifs, ou encore le fusil à pompe posé sur la tempe d’un malheureux reporter.
L’intervention rapide des forces de l’ordre a permis de mettre fin à la prise d’otages sans faire de victime et d’arrêter treize assaillants, âgés de 16 à 25 ans. “J’ai été frappé par leur inexpérience”, a raconté l’un des journalistes pris en otage à l’AFP. “Au fond, ce n’étaient que des enfants.”
Les procureurs font face à des menaces émanant d’une vingtaine de gangs
Cet assaut a marqué le point culminant d’une série de violences déclenchées par l’évasion, quelques jours plus tôt, du redouté chef du gang des Choneros, Adolfo Macias, alias « Fito ». Des mutineries et des prises d’otages de gardiens ont éclaté dans plusieurs prisons, tandis que dans les rues de Guayaquil et de la capitale Quito, les gangs ont semé la terreur par des explosions et des tirs dirigés contre la police.
Ces violences ont causé la mort d’au moins 19 personnes. Pour rétablir l’ordre, le président équatorien Daniel Noboa a déclaré le pays en “état de guerre” contre les gangs, mobilisant plus de 20 000 militaires sur le terrain.
Alors que l’Équateur est devenu le principal point d’exportation de la cocaïne produite dans les États voisins du Pérou et de la Colombie, les procureurs sont sous la menace d’une vingtaine d’organisations criminelles. Diana Salazar a signalé des menaces de mort directes de la part de Los Lobos, l’une des principales organisations criminelles, dont le chef, Fabricio Colon Picole, s’est également échappé de prison la semaine dernière. En juin de l’année dernière, le procureur Leonardo Palacios avait été tué par des hommes armés dans la ville de Duran, voisine de Guayaquil.