Après une réunion décisive de la Communauté des Caraïbes (Caricom), le Premier ministre Ariel Henry, dont le mandat était fortement contesté, a consenti à quitter ses responsabilités.
Est-ce un début de calme en vue ? Alors que des affrontements secouent la capitale haïtienne, Port-au-Prince, opposant les forces de l’ordre à des groupes armés ciblant des lieux stratégiques tels que le palais présidentiel, les commissariats et les prisons, le Premier ministre haïtien, Ariel Henry, a démissionné.
En proie à une forte contestation et incapable d’endiguer cette vague de violences, son départ a été annoncé ce lundi 11 mars par le président de la Communauté des Caraïbes (Caricom) et un responsable américain, à l’issue d’une réunion à Kingston, en Jamaïque.
Mohamed Irfaan Ali, président du Guyana et de la Caricom, a également salué lors d’une conférence de presse “un accord de gouvernance transitoire ouvrant la voie à une transition pacifique du pouvoir, à la continuité de la gouvernance, à un plan d’action à court terme en matière de sécurité et à des élections libres et équitables”.
Les pays des Caraïbes se sont réunis en urgence lundi, sur l’initiative de la Caricom, en présence de représentants de l’ONU et de plusieurs pays, dont la France et les États-Unis, dans l’espoir de progresser vers une solution en Haïti.
Ariel Henry, le Premier ministre peu désiré
Ariel Henry aurait dû abandonner son poste dès le 7 février. Malgré le refus de quitter ses fonctions, il avait accepté de superviser l’organisation d’élections générales d’ici la mi-2025, une proposition considérée comme ridicule par les gangs et une partie de la population, farouchement opposée à son maintien au pouvoir. Cela a alimenté des violences meurtrières.
“Si Ariel Henry ne démissionne pas, si la communauté internationale continue de le soutenir, nous allons tout droit vers une guerre civile qui conduira à un génocide”, avait averti début mars Jimmy Chérizier, alias “Barbecue”, principal chef de gang.
Surtout, Ariel Henry avait refusé de négocier la formation d’un gouvernement d’unité avec les partis de l’opposition et les groupes de la société civile. Sans président ni parlement – le dernier chef d’État, Jovenel Moïse, ayant été assassiné en 2021 – Haïti n’a pas organisé d’élections depuis 2016.
Bloqué à Porto Rico après s’être vu refuser l’entrée dans la capitale haïtienne, Ariel Henry a participé à distance à la réunion avec les membres de la Caricom.
Il a confirmé sa démission lors d’un appel téléphonique lundi avec le secrétaire d’État Antony Blinken, selon un responsable américain, qui a également assuré qu’il était le bienvenu s’il souhaitait rester à Porto Rico.
Le président du Guyana avait averti il y a quelques jours que la Caricom avait l’intention d’aider à restaurer “la stabilité et la normalité” en Haïti, qualifiant la situation sur place de “désespérée”. Selon plusieurs diplomates, la réunion de Kingston visait à formaliser une proposition à Ariel Henry pour qu’il cède le pouvoir à un conseil de transition composé d’un large éventail de la société civile haïtienne.
En route vers une réduction des violences ?
Maintenant, la question se pose sur les répercussions de cette démission dans les rues de Port-au-Prince, actuellement paralysées. Un signe récent de la crise sécuritaire est l’évacuation lundi de tout le personnel de l’Union européenne présent en Haïti. Dans la nuit de samedi à dimanche, les Américains ont évacué leur personnel diplomatique non essentiel par hélicoptère.
Bien que les autorités haïtiennes aient déclaré l’état d’urgence il y a une semaine, avec un couvre-feu nocturne dans le département de l’Ouest, incluant la capitale, elles ne contrôlent pas complètement la région. Ce couvre-feu a été prolongé jusqu’à jeudi, selon un communiqué officiel.
Le Conseil de sécurité de l’ONU a appelé lundi tous les acteurs politiques haïtiens à engager des “négociations sérieuses” pour restaurer les institutions démocratiques du pays.
Le secrétaire d’État américain Antony Blinken a annoncé que les États-Unis fourniraient 133 millions de dollars supplémentaires pour résoudre la crise, dont 100 millions pour la force multinationale devant être envoyée en Haïti, et 33 millions pour l’aide humanitaire. Le Premier ministre canadien Justin Trudeau, participant virtuellement aux discussions, avait précédemment promis environ 91 millions de dollars.