Le budget de l’État pour l’année 2024 a été adopté grâce au rejet d’une nouvelle motion de censure émanant de la gauche, malgré une atmosphère générale de lassitude.
Le rituel se répète inlassablement semaine après semaine. Ce jeudi 21 décembre, à l’Assemblée nationale, le budget de l’État pour l’année 2024 a été définitivement approuvé grâce au rejet d’une nouvelle motion de censure présentée par la gauche. Ce vote infructueux marque la conclusion d’un exercice budgétaire marqué par une série d’utilisations de l’article 49.3, suscitant la lassitude tant du côté de l’opposition que de la majorité.
À titre d’exemple, loin des débats enflammés des semaines précédentes sur la question de l’immigration, la dernière réunion de l’année s’est déroulée dans un hémicycle notablement clairsemé. Les députés se sont réunis pour assister au rejet de la motion dans un contexte marqué par une atmosphère moins tendue.
Succession de 49.3, motion de censure, 49.3, motion de censure…
En appelant à la censure, Eric Coquerel, membre de La France insoumise et président de la commission des Finances, a exprimé son opposition tant au budget qu’à la loi sur l’immigration, qualifiée par lui de “ignominieuse” et “nauséabonde”. Sans surprise, la motion de censure n’a recueilli que 116 voix, bien en deçà des 289 nécessaires pour renverser le gouvernement. Son rejet entraîne l’adoption du projet de loi de finances 2024 (PLF).
Face à ses détracteurs, la Première ministre Élisabeth Borne a défendu la création de plus de 2 000 postes de policiers et gendarmes, une augmentation des moyens de la Justice et de la Défense, des revalorisations pour les enseignants, ainsi qu’un “budget vert” comprenant 7 milliards d’euros supplémentaires pour la transition écologique.
Cependant, confronté à des problèmes persistants de majorité relative, le gouvernement a eu recours à l’article 49.3 à dix reprises cette année, une arme constitutionnelle permettant d’adopter le budget de l’État et celui de la Sécurité sociale sans vote. La répétition du ballet bien réglé a créé une lassitude dans l’hémicycle, plus marquée que l’année précédente lorsque les députés faisaient face à la nouvelle configuration de l’Assemblée nationale sans majorité absolue. Face à cette routine trop familière, l’opposition dénonce le “mépris du Parlement” et le “déni de démocratie”, mais avec peu d’espoir de voir le gouvernement d’Élisabeth Borne vaciller.
Sur le fond des débats, le gouvernement avance avec précaution entre ses dépenses et l’objectif de réduire le déficit public à 4,4 % du PIB en 2024. Le ministère des Finances s’est engagé à réaliser 12 milliards d’économies supplémentaires par an à partir de 2025, une mission jugée “difficile” par certains députés macronistes.
Diffusion en continu, location sur Airbnb et Fifa
La gauche critique déjà ce qu’elle considère comme “l’austérité”. Elle reproche au gouvernement de ne pas agir de manière suffisante en matière d’écologie et de logement, tout en refusant d’augmenter la fiscalité des plus riches ou des grandes entreprises. De son côté, la droite estime que des économies structurelles font défaut, avec notamment une demande de réduction de 6 milliards d’euros des indemnités chômage de la part des Républicains (LR).
Dans la dernière ligne droite, les débats ont porté en particulier sur les pénuries de logements, qualifiées de “bombe sociale” par de nombreux élus. Entre deux recours à l’article 49.3, le gouvernement a laissé passer une mesure du Sénat visant à réduire plus drastiquement que prévu les avantages fiscaux accordés aux locations de meublés touristiques, comme Airbnb. Une “erreur matérielle”, selon le gouvernement, qui assure que cette mesure ne s’appliquera pas en 2024, malgré les appels en ce sens de la gauche et de la majorité.
Une autre controverse concerne le soutien du gouvernement, contre l’avis de l’opposition, à des mesures fiscales avantageuses pour les fédérations sportives internationales, notamment dans le but d’attirer en France la puissante FIFA, grande instance du football mondial. Lisette Pollet (RN) a dénoncé un “mini-paradis fiscal”.
Par ailleurs, l’exécutif a adopté une taxe sur les plateformes de streaming musical, initialement votée au Sénat, afin de financer le Centre national de la musique (CNM). Cette décision a suscité la réaction de Spotify France, qui a annoncé qu’elle cesserait de soutenir les Francofolies de La Rochelle et le Printemps de Bourges à partir de 2024.
Pour améliorer la construction du budget, le gouvernement prévoit d’avancer l’an prochain les discussions budgétaires, y compris avec les partis d’opposition. “Le budget 2025 sera encore plus exigeant. On doit le construire très tôt”, a expliqué le ministre des Comptes publics, Thomas Cazenave.