Député sous la IVe République, Jean-Marie Le Pen a conduit l’extrême droite jusqu’au second tour de l’élection présidentielle de 2002.
Jean-Marie Le Pen, figure marquante de l’extrême droite française et fondateur du Front national, devenu Rassemblement national, est décédé ce mardi 7 janvier à l’âge de 96 ans, a annoncé sa famille à l’AFP. Ancien combattant des guerres d’Indochine et d’Algérie, où il a été accusé d’actes de torture, il s’était présenté à cinq reprises à l’élection présidentielle.
Élu député pour la première fois en 1956 sous la bannière poujadiste, il conserve son mandat jusqu’en 1962. En 1972, il prend la tête du jeune Front national, formation issue du mouvement nationaliste Ordre nouveau. Dès ses débuts, il adopte un discours radical, déclarant : « Un million de chômeurs, c’est un million d’immigrés en trop. » Cependant, les premières années sont difficiles, comme en témoigne son score modeste de 0,75 % à l’élection présidentielle de 1974. En 1981, il ne peut même pas se présenter, faute de parrainages suffisants.
Les années 80 marquent néanmoins l’ascension de Le Pen et du Front national. Après des succès électoraux locaux, comme lors des municipales de Dreux en 1983, le parti réalise une percée aux européennes de 1984 avec 11 % des voix, avant de s’imposer à l’Assemblée nationale en 1986. Profitant du retour du scrutin proportionnel, Le Pen transforme ses 9,7 % de voix en 37 sièges parlementaires.
Aux côtés de figures comme Bruno Gollnisch, Bruno Mégret ou Jean-Pierre Stirbois, Le Pen tente alors de redorer l’image du parti. En mars 1986, il déclare au Point : « On attend des députés au crâne rasé. On va découvrir des élus réfléchis et résolus. On attend des baroudeurs. On va voir un groupe responsable qui n’a rien d’une bande d’exaltés. » Cette stratégie de « normalisation » influencera plus tard la ligne politique de sa fille, Marine Le Pen.
Controverses et bouleversement
Le succès électoral de Jean-Marie Le Pen s’accompagne de nombreuses polémiques médiatiques et de longs démêlés judiciaires, certains s’étendant sur plusieurs décennies. En septembre 1987, invité sur RTL, il suscite l’indignation en qualifiant les chambres à gaz de « détail de l’histoire » de la Seconde Guerre mondiale, une déclaration qui lui vaudra plusieurs procédures judiciaires.
Malgré cette controverse, il réalise un score significatif de 14,4 % à la présidentielle de 1988, puis atteint 15 % en 1995. Son plus grand coup d’éclat survient en 2002, lorsqu’il accède au second tour de l’élection présidentielle en éliminant le Premier ministre socialiste Lionel Jospin, un véritable séisme politique. Toutefois, son discours anti-immigration et sa personnalité controversée sont largement rejetés au second tour, Jacques Chirac l’emportant avec plus de 82 % des voix.
Sa dernière participation à une présidentielle, en 2007, se solde par un échec avec 10,4 % des suffrages, le conduisant à céder la présidence du Front national à sa fille Marine Le Pen en 2011. La transition est cependant conflictuelle : en 2015, il est exclu du parti après de nouveaux propos polémiques. Un ultime communiqué du RN en mars 2018 confirmait cette exclusion, tout en déplorant que la justice maintienne son titre de président d’honneur. Ce statut sera finalement supprimé par un vote interne, marquant la transformation du Front national en Rassemblement national.
Farouche opposant à l’Union européenne, Jean-Marie Le Pen a terminé sa carrière politique au Parlement européen, où il a siégé presque sans interruption depuis 1984. Son dernier mandat s’est achevé en 2019, l’année de sa mise en examen dans l’affaire des assistants parlementaires du Front national, toujours d’actualité aujourd’hui.